Paysage Gestion des eaux de pluie : retour aux sources
Les villes ont historiquement mis en place des systèmes de collecte des eaux. Mais avec l’étalement urbain et l’imperméabilisation des sols, les réseaux saturent toujours plus vite. La gestion des précipitations devient un sujet incontournable, avec à la clé des économies possibles.
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«On a construit de manière dense et minérale en ville. Grâce à des réseaux, les eaux pluviales étaient évacuées. Ce modèle doit être repensé en faveur de l’infiltration », constatait Robin Dagois, chargé de mission à Plante & Cité, lors d’une conférence donnée dans le cadre de la dernière édition du Salon Paysalia. « Il s’agit d’un sujet fort pour les collectivités, notamment dans le contexte du changement climatique », pointe-t-il. Les revêtements perméables sont l’une des clés de ce problème. « Il y a beaucoup de choix, pourtant cette solution est encore peu privilégiée », estime-t-il.
Au-delà de la question de la gestion de l’eau, les sols perméables répondent à différents enjeux : ils augmentent notamment la valeur paysagère et le support de végétation. Ils peuvent également favoriser la biodiversité, réduire la pollution des eaux et les îlots de chaleur urbains… Plante & Cité a voulu faire le point sur cette solution via son programme d’étude « revêtements perméables » entre 2018 et 2020. Un « livrable » de synthèse a été publié en avril (lire en Repères).
À Douai (59), un travail sur les stationnements
Il existe une grande diversité dans la typologie des revêtements perméables : mélanges organo-minéraux et couverts enherbés, revêtements meubles organiques, revêtements meubles minéraux, pavés drainants ou à joints poreux, dalles alvéolées, platelages bois, bétons de résine drainants, enrobés poreux… Les usages, l’entretien, le coût et la perméabilité sont très variables d’une conception à l’autre.
À Douai (59), les parkings ont été réaménagés pour permettre aux eaux pluviales de s’infiltrer directement. Plusieurs techniques sont utilisées : herbe, dalles, revêtements composites, enrobés poreux… Douaisis agglo anime depuis 1992 une politique de gestion des eaux pluviales à la source permettant une économie estimée de un million d’euros par an en amortissement, exploitation, maintenance et gestion (soit une économie globale de 35 euros par an et par mètre carré).
Comme les eaux pluviales s’infiltrent et sont stockées sur place, ce sont autant de mètres cubes qui n’ont plus besoin d’être collectés et traités par les réseaux d’assainissement. Les coûts d’entretien des réseaux, d’épuration des eaux et d’investissement des ouvrages d’assainissement sont alors réduits. Dans la ville, l’évolution des volumes d’eau déversés a fortement baissé, passant de 1 850 000 m3 par an à 417 234 m3 pour une pluviométrie quasi constante d’environ 651 mm/an depuis 2006.
Certaines réalisations s’avèrent moins coûteuses dès la conception du projet. C’est ce qu’a révélé une étude autour d’un territoire de 500 hectares à Lyon (69). Les frais d’investissement étaient six fois moins élevés pour la mise en œuvre d’ouvrages de gestion des eaux pluviales à la source. L’écart de prix s’explique en partie par les coûts de curage des bassins d’orage.
La législation fait avancer la cause
Il existe une myriade d’autres solutions pour que les villes puissent mieux gérer les eaux pluviales. En particulier la végétalisation des bâtiments. Cet aspect est de plus en plus pris en compte lors de chantiers de construction et/ou de rénovation du bâti. Elle est même obligatoire dans certains cas (lire Le Lien horticole n° 1111 de décembre 2021, p.34).
La végétalisation des bâtiments, et notamment des toitures, n’a pas pour seul avantage une meilleure gestion des eaux pluviales : lutte contre les îlots de chaleur, apport de biodiversité, amélioration du cadre de vie… Pour certains projets immobiliers, les toitures s’avèrent capables d’absorber la quasi-totalité de l’eau de pluie qu’elles reçoivent. C’est par exemple le cas de l’école des Sciences et de la Biodiversité, à Boulogne-Billancourt (92) (lire en rubrique Paysage, p.46).
Les noues paysagères mixent gestion de l’eau et biodiversité
Les noues paysagères sont une autre solution à ne pas négliger. Elles aussi font intervenir du végétal tout en améliorant la gestion des eaux pluviales. Elles vont s’intégrer facilement dans les espaces verts communs généralement demandés dans les documents d’urbanisme. L’eau est collectée soit par le biais de canalisations, soit par ruissellement direct sur les surfaces environnantes.
Il est recommandé de privilégier dans le projet les pentes douces, qui augmentent la zone d’échange terre-eau, idéale pour abriter une biodiversité. Le choix des essences s’effectue principalement parmi les espèces hygrophiles ou aquatiques : saules, aulne glutineux, roseau ou iris des marais, par exemple.
Si la loi ne requiert aucune disposition de sécurité particulière, un tressage en saule, une haie d’arbustes locaux, la fauche tardive des plantes de berge ou encore une roselière seront utiles pour garder les passants à distance de l’eau.
Il existe tout un panel de solutions pour gérer les eaux pluviales à la source, qu’il vaut mieux additionner. On peut ajouter aux exemples cités les mares, les bassins d’infiltration ou des cuves de récupération d’eau de pluie... C’est avec cet ensemble de techniques que collectivités et concepteurs doivent composer aujourd’hui pour sortir du « tout-tuyaux » !
Léna HespelPour accéder à l'ensembles nos offres :